PAR JUSTINE BELLEFEUILLE
Dans le cadre de la 9e Biennale nationale de sculpture contemporaine dont la thématique est CROIRE, Entropé, une œuvre de Patrick Bérubé est exposée à la Galerie R3 de l’UQTR. L’installation porte sur le stockage d’information et l’impact écologique de celui-ci tout en faisant des liens avec de multiples sujets connexes. On retrouve dans cette vaste galerie plusieurs éléments, dont une projection, une photo, de petites et de grosses sculptures, ainsi qu’un jeu de lumière et de son. Cette exposition montre l’immense importance du lieu dans lequel est exposée une œuvre d’art. L’environnement influence beaucoup la lecture. En ce sens, considérant l’impact du lieu sur l’œuvre, peut-on dire que l’espace a un potentiel sculptural et donc que l’espace devient partie intégrante de la sculpture ?
Tout d’abord, je considère que l’œuvre de Patrick Bérubé est immersive. L’atmosphère est particulière. Il y a une tension dans la salle, un dialogue entre les différents éléments. Les idées et les concepts circulent facilement dans la galerie. L’œil du regardeur est sollicité un peu partout et est invité à faire des connexions entre chacune des pièces qui composent Entropé. Cette expérience est complètement différente que d’admirer une simple sculpture. Ainsi, avons-nous réellement besoin du mot « sculpture » ou « installation » pour définir ce type d’exposition ? Dans la revue Espace, le texte intitulé La sculpture, vous dites ? de Maxime Coulombe explique ceci :
Que l’on parle désormais davantage d’installation que de sculpture – et bien que ces termes ne soient pas parfaitement synonymes - est révélateur. Ce que cette transformation met en évidence, c’est le déplacement de l’attention de l’objet vers l’expérience qu’il procure au spectateur. L’installation tend à placer l’attention moins sur un objet précis, sur lequel nous pourrions jeter un regard esthétique, que sur l’idée d’un espace […] procurant une expérience.[1]
Bref, dans l’œuvre de Bérubé, ce qui importe c’est ce que l’on vit en rentrant dans la salle peu chargée en matières tangibles, mais qui est pourtant bien riche en concepts.
Le vide, les espaces négatifs sont importants pour la lecture de l’œuvre. Ainsi, le vide devient sculpture parce que celui-ci a cette capacité à accueillir de l’information visuelle, physique et sonore et peut également transmettre cette dernière à travers un espace donné. Cet espace contenu entre les murs de la galerie est sculptural. C’est un espace invisible rempli de particules qui se réorganisent pour laisser la place aux objets. D’ailleurs, ce vide a également cette capacité à reposer l’œil et permettre aux autres éléments de se démarquer davantage.
Pour conclure, je dirais que l’exposition de Patrick Bérubé est une expérience qu’il faut vivre. L’impact de l’œuvre sur le regardeur va au-delà de la sculpture 3D en soi. Entropé se situe à mi-chemin entre la sculpture et l’installation. L’environnement est immersif par son jeu de lumière cyclique et par l’utilisation d’un son sourd oppressant. On ressent tout autant les éléments tangibles que le vide qui nous entoure. Bref, Bérubé met à l’épreuve la définition classique de la sculpture de par l’utilisation de l’espace, et donc de par l’emplacement des éléments de l’œuvre. Finalement, peut-être que la sculpture se trouve seulement dans notre imaginaire. Peut-être qu’il faut CROIRE en la sculpture pour la voir.
[1] COULOMBRE, Maxime (automne 2014). « La sculpture, vous dites ?» Espace -Art actuel – Pratiques et perspectives, Re-penser la sculpture ?, no. 108, p. 9.