PAR VIVIANE SAULNIER
Janet Macpherson, influencée par son éducation catholique et inspirée des migrations de certains peuples présente Migration, une œuvre installative où des animaux hétéroclites prennent place sur une arche, un pont vers une destination inconnue. Ces êtres singuliers se déplacent ensemble, mais seuls à la fois. Certains peinent, certains sont portés, certains guident la procession tandis que d’autres tombent et sont laissés pour compte. Cette installation peut évoquer plusieurs avenues différentes, tombant dans la représentation de notre société, ou davantage dans une réminiscence de symboles et idéologies religieuses.
Ma première réaction à la vue de cette œuvre fut une admiration réelle pour l’artiste, et une fascination sans égale pour son travail. Ses personnages hybrides, si délicats et fragiles par leur matière, travaillés avec minutie et sensibilité réussissent à dégager une puissante force de caractère. Certains me semblèrent plus poétiques, d’autres plus étranges et rigolos, mais chacun était insufflé d’une grande singularité. Ainsi, à chaque petite pièce que je visitai du regard, un monde et une biographie complète prenaient forme.
En installant les personnages de Macpherson sur l’arche, nous fûmes peu à peu entrainées dans une aventure malgré nous. Le processus d’installation et le fait de devoir choisir où irait chaque pièce, de voir comment elles pourraient interagir ensemble ou même avec l’extérieur se fit naturellement en fonction de la personnalité de chacune d’entre elles. Les personnages les plus confiants se sont donc instinctivement retrouvés en tête, alors que les plus lents ou plus inattentifs se retrouvèrent davantage vers la fin. C’était comme si l’histoire se construisait d’elle-même devant nous. En réalisant cette étape du montage, j’ai ressenti excitation et apaisement à la fois. La construction d’un narratif et le processus d’analyse impliqué dans la disposition de si belles pièces nous enlevèrent dans une certaine euphorie animant les discussions. Ces moments plus fébriles faisaient ensuite place à des moments de calme, où, concentrés au côté technique du montage, nous partagions des moments de silences atténués de quelques rares mots. Chaque moment fut précieux et chaque discussion en découlant, surtout sur nos différentes interprétations de tel ou tel personnage, nous anime encore simplement en l’évoquant.
C’est en outre une installation que j’ai trouvé intéressante autant sur le plan technique qu’à travers le lyrisme dans lequel on peut s’emporter en essayant de la signifier. Migration de Janet Macpherson vaut la peine d’être observé avec temps et attention. L'oeuvre se trouvera du 1er août au 11 septembre à la Galerie d’art du Parc dans le cadre de la 9e Biennale nationale de sculpture contemporaine.